Travail à la marge
C’est la bordure d’une chose, puis au sens abstrait, un intervalle de temps, de latitude dont on dispose entre certaines limites. La marge ! Quand on s’intéresse à un domaine en particulier, il faut connaître les marges.
D’abord, il figure les limites de notre connaissance. Que sais-je ?
Ensuite, au-delà des contours abstraits de notre ignorance, se profilent des idées. Que nous est-il permis de savoir et de découvrir ?
Quelles sont, enfin, les variables de temps et d’espace qui me contraignent ?
Voir les marges, c’est tout simplement un exercice pratique pour mieux comprendre le monde qui nous entoure, en général, ou un domaine d’étude, en particulier.
Je pourrais m’intéresser, à titre d’exemple aux marges de l’intelligence dite artificielle.
Que sais-je à propos d’elle ?
Que m’est-il permis de découvrir à propos d’elle ?
Comment la définir dans un espace et dans le temps ?
Sans développer les trois questions, il m’est toutefois permis d’en tirer les grandes lignes :
Il n’y a pas une intelligence artificielle. C’est une collection d’outils informatiques utilisant des données afin d’exécuter des tâches très complexes rapidement. (Première variable de temps : la presque instantanéité des calculs.)
Les intelligences artificielles sont des machines suffisamment puissantes pour modifier des civilisations. On se pose souvent la question : à quelles fins ? Vient souvent l’idée que les intelligences artificielles pourraient se fédérer, alors on pourrait dire : à quelle fin singulière ? Mais les questions qui nous intéressent sont plutôt : de quelle manière transforment-elles une civilisation et… comment ?
Du point de vue matérialiste, les intelligences artificielles sont encore contraintes physiquement aux circuits imprimés et aux composants informatiques, mais des recherches suivent leur cours afin de les implémenter notamment à des tissus organiques. Voilà les premières limites physiques. De quelles marges dispose l’humanité, notamment, pour se poser les questions éthiques que cela nous impose ! Y a-t-il seulement encore de la place pour l’éthique en regard de l’IA ? Combien de temps m’est-il encore alloué afin de me poser ce genre de question avant que je ne sois remplacé et que l’humanité passe à la marge ?