5 états de conscience
Faire l’expérience de l’individuation, à la manière dont l’entendait Jung, force à se plonger dans des états bien singuliers. Mais d’abord, une erreur commune doit être relevée, à savoir qu’il existe une différence fondamentale entre l’individuation et l’individualisation. De manière réductrice, cette dernière consiste à murir en tant qu’adulte à l’aide de sa conscience, du rapport des autres en se limitant aux données sensibles, celle de l’expérience de nos sens. L’individuation consiste à explorer des états de conscience différents de ce que nos sens connus nous livrent comme message sur nous et sur le monde dans lequel nous vivons pour approfondir notre personnalité afin de devenir véritablement soi. Ceci étant, les processus d’individuation sont nombreux, mais l’esprit attentif qui s’initie à autre chose que ce que l’œil, l’oreille, la langue, le nez et la peau perçoivent trouve rapidement en lui les forces et les faiblesses qui forment sa vraie personnalité. Ensuite, il les mènera jusque’à leur plein potentiel. Il est question des forces. Quant aux faiblesses, il s’exerce à les transformer en force autant que faire se peut. Facile à écrire ? Certes, mais comme tout exercice, il existe une méthode, ou plutôt un chemin. Plutôt, des chemins nouveaux; ceux de l’exploration, de la découverte, mais aussi de l’égarement… pour mieux se retrouver. En nous, au plus profond de notre esprit, existe des zones d’ombre qu’il convient de fouler le pas. D’ailleurs, si les forces et les faiblesses se trouvent déjà en nous, c’est bien là, en nous, qu’il convient de voyager. Marchez au-delà de la perception sensible, mais comment ?
Chaque nuit, nous faisons l’expérience d’autre chemin. Les rêves violent les lois qui régissent notre sensibilité consciente. En rêve je vole, je respire sous l’eau, je voyage dans le temps, et cetera. Explorer ses rêves, y porter une attention plus que particulière est un terrain favorable à l’exploration en soi. Or, il ne s’agit pas du seul moyen qui est à notre portée pour atteindre l’individuation. D’ailleurs, on n’atteint rien. Il n’y a pas de but dans l’individuation tout autant que l’initié pérégrine « par delà le bien et le mal ». On s’initie à une perception différente qui n’aura de cesse de s’approfondir. D’autre état de conscience que l’ambivalence veille et sommeil permettre de fouler le pas dans l’inconscient. De ceux-là, j’énoncerai le rêve éveillé et la méditation.
Je ne saurai bien parler de la méditation pour n’en avoir fait l’expérience que très rarement. Pour peu que j’en sache, elle est porteuse de réponses, de découvertes aussi, pour ceux que cherchent, néanmoins. Mais on cherche quoi ? L’individuation, l’exploration de l’inconscient est intime, strictement personnelle. Les découvertes ne peuvent être que subjectives, mais chacune porte sa force. Par méditation, je n’entend pas exclusivement cette pratique issue de l’orient. La prière répétitive permet de générer des sensations similaires. Par l’habitude des mots, le sujet allège son esprit.
Le rêve éveillé, que je pratique tous les jours, ressemble à la méditation. Le sujet, celui qui pense, peut être immobile, comme lorsqu’il médite, ou en mouvement comme le marcheur rêvant. La distinction fondamentale entre la méditation et le rêve éveillé est que dans le premier cas, le sujet tente de faire elle vide, alors que dans le deuxième cas, il explore une pensée dialogique, voire narrative, avec lui-même. Il se permet des détours, des émerveillements sur les beautés de la nature (s’il marche). Cette exploration éveillée est un état de conscience proche de l’auto-hypnose. Notez au passage que l’on peut entrer en état de méditation grâce à l’hypnose qui est aussi un autre état de conscience avec lequel l’esprit peut avancer sur le chemin de l’inconscient.
Des états de conscience, on notera donc: l’éveil, le rêve endormi, la méditation, le rêve éveillé et l’hypnose. Chacun est libre de forger sa personnalité avec l’un ou l’autre de ces états. Certains sont plus efficaces que d’autres en fonction de sa propre sensibilité. Aussi, il est bon de ne pas confondre états et moyens d’y parvenir. Je pense notamment à la détente, à la marche, à la lecture, à l’écoute de la musique, mais aussi, il faut bien le reconnaître, à l’usage de certains psychoaffectifs, mais aussi la répétition et à la production artistique.
Aussi, à ces états de conscience, il faudrait aussi se pencher sur les moments de transition, notamment à l’endormissement où les images hypnagogiques abondent et au réveil largement porteur de réponses. Parfois une période de méditation ou de prière se transforme en rêve éveillé. La répétition d’une tâche répétitive au travail peut aussi plonger d’un état de conscience à un état de semi-conscience où les gestes sont assurés par l’habitude, mais où l’esprit voyage.
Enfin, il ne s’agit pas en l’occurence de donner les outils et les méthodes pour l’exploration. Tout au plus, il convient d’ouvrir les œillères qui trop souvent ne limitent le regard qu’à la stricte conscience éveillée.